Lettre ouverte sur les pistes cyclables

12 octobre 2023

Lettre ouverte publiée dans La presse:

Les personnes vivant avec une déficience visuelle doivent parfois traverser les pistes pour accéder à l’autobus, ce qui peut être une tâche difficile, voire dangereuse. Les personnes aveugles ou malvoyantes se fient notamment au son de la circulation pour déterminer le moment de traverser une intersection. Étant donné le caractère plus silencieux de la circulation cycliste, il peut être compliqué de trouver le bon moment pour traverser la piste.

Lorsqu’un arrêt d’autobus est situé de l’autre côté d’une voie cyclable, les personnes aveugles ou malvoyantes courent le risque d’être happées par les cyclistes. Une personne aveugle nous a récemment témoigné qu’un chauffeur de bus lui a demandé d’attendre avant de descendre de son véhicule, jugeant que la circulation cycliste était trop abondante. La personne en question descend à cet arrêt régulièrement depuis des années. Or, jamais auparavant elle n’avait constaté qu’il y avait effectivement une piste cyclable séparant l’arrêt du trottoir. C’est dire combien ce danger peut être imperceptible pour les personnes aveugles ou malvoyantes…

Dans l’aménagement des pistes cyclables, les personnes aveugles ou malvoyantes sont trop souvent oubliées. Le Regroupement pour les aveugles et amblyopes du Montréal métropolitain (RAAMM) comprend la nécessité de repenser l’aménagement des villes dans le contexte des bouleversements climatiques. Les déplacements actifs, y compris l’utilisation du vélo, font certainement partie des solutions à la portée de la plus grande majorité. En contrepartie, il est primordial que la réflexion faite en amont des nouvelles installations tienne compte des besoins de tous et toutes, en incluant ceux des personnes aveugles ou malvoyantes.

Tout comme notre allié de la Ville de Québec, le Regroupement des personnes handicapées visuelles 03-12, nous constatons que ce n’est souvent pas le cas. À l’heure actuelle, les nouveaux aménagements s’effectuent dans la précipitation, sans véritable considération de la réalité de tous et toutes. Par conséquent, les personnes aveugles ou malvoyantes se retrouvent confrontées à des défis importants lors de leurs déplacements — notamment, ceux posés par les voies cyclables.

Feux sonores

Comme mentionné plus haut, les piétons aveugles ou malvoyants se synchronisent avec la circulation grâce au son des voitures en déplacement. Pour cette raison, séparer la circulation automobile des piétons aveugles ou malvoyants par une piste cyclable peut interférer avec leur capacité de percevoir les sons adéquatement. L’interférence est pire encore aux intersections où il y a un terre-plein.

Depuis plusieurs années, des feux sonores sont implantés pour assurer la sécurité des personnes aveugles ou malvoyantes aux intersections. Les feux sonores constituent assurément une solution privilégiée pour sécuriser la traversée des rues. Là où la circulation automobile est éloignée des piétons aveugles ou malvoyants, ces dispositifs sont d’autant plus indispensables. En plus d’être un vecteur de sécurité, l’installation de feux sonores favorise l’autonomie des personnes aveugles ou malvoyantes en réduisant leur dépendance à l’égard de tiers.

Nous demandons aux municipalités qu’elles mettent en place des aménagements urbains véritablement inclusifs. Pour ce faire, il est fondamental de considérer les besoins de tous ceux et celles qui sont concernés, y compris ceux des personnes aveugles ou malvoyantes. La communauté des personnes aveugles ou malvoyantes est prête à coopérer.

Ensemble, on y voit.

Avec l’appui d’Ex Aequo, du Bon Pilote, de Kéroul et de l’Association québécoise de la dégénérescence maculaire.

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