Accélération du virage numérique : prière de ne pas en faire un facteur supplémentaire d’exclusion

13 août 2020

Alors que la crise actuelle de la Covid-19 commande de réduire les interactions directes entre les personnes lorsque cela est possible en vue d’éviter les risques de transmission du virus, le Regroupement des aveugles et amblyopes du Montréal métropolitain (RAAMM) s’inquiète que l’accélération du virage numérique se fasse au détriment de nombreuses personnes, notamment des personnes handicapées visuelles.

 

Le RAAMM constate que de plus en plus d’entreprises et d’établissements publics et privés se tournent vers internet pour offrir leurs services ou comme seul canal de communication avec leur clientèle. « C’est une erreur de miser uniquement sur le Web parce que ce n’est pas tout le monde qui y a accès ou qui est à l’aise d’utiliser ces technologies, que l’on soit une personne handicapée visuelle ou non », souligne Mme Pascale Dussault, directrice générale du RAAMM. Le RAAMM rappelle que des alternatives doivent être offertes pour permettre à tous et toutes d’avoir accès aux mêmes services.

 

« La Covid a le dos large quand vient le temps de justifier que des personnes soient exclues par l’adoption de nouvelles procédures », déplore Mme Dussault. À titre d’exemple, il a été porté à l’attention du RAAMM qu’actuellement les réservations pour accéder au Complexe aquatique du Parc Jean-Drapeau peuvent uniquement être faites en ligne. Ainsi, pour une partie de la population, il n’est plus possible de profiter de cet endroit puisqu’aucun moyen de réservation alternatif n’est disponible malgré l’adoption par la Ville de Montréal d’une politique en accessibilité universelle. « Je suis une habituée de cet endroit et j’y vais près d’une vingtaine de fois par été, mais cette année je ne peux pas y aller parce que je ne suis pas assez à l’aise avec l’informatique pour réserver ma place », explique Mme Danielle Fouquereau, membre du RAAMM. « Je suis certaine que je ne suis pas la seule dans cette situation. Il suffirait par exemple d’offrir la possibilité de faire une réservation par téléphone pour que l’on puisse de nouveau profiter des installations du Parc Jean-Drapeau, notamment pour se rafraîchir pendant les vagues de chaleur », ajoute-t-elle.

 

Rappelons que bien qu’il soit possible pour les personnes handicapées visuelles d’utiliser un ordinateur, une étude menée par le RAAMM en 2018 sur un échantillon de 960 sites Web démontre que la très grande majorité des sites Web présentent des obstacles importants en matière d’accessibilité ce qui empêche ces personnes d’y naviguer. À peine 17% des sites Web évalués atteignaient un niveau « passable » d’accessibilité. « Les entreprises veulent rapidement se tourner vers des solutions d’affaires numériques, mais le feront-elles en respectant les règles d’accessibilité? Rien n’est moins sûr », remarque Mme Dussault.

 

Ainsi, bien que le virage numérique déjà en branle soit incontournable, il est essentiel de garder en tête que les solutions Web adoptées doivent être accessibles et que des solutions alternatives doivent être mises en place pour permettre à l’ensemble des citoyennes et citoyens de bénéficier des mêmes services.